Dans la maison
Il reste encore plus de trois mois avant la date prévue d'accouchement ; nous ne sommes pourtant pas du genre à tout préparer dans l'excitation, l'impatience et l'insouciance. Certains diront que c'est normal avec la grossesse que nous avons vécue pour les grumeaux ; disons qu'elle n'a fait que nous rendre plus prudents, plus méfiants mais que nous n'étions déjà pas du genre à repeindre la chambre pendant le premier trimestre. Cette fois-ci, c'est différent : les quelques réaménagements que nous avons prévus dans la maison vont prendre un peu de temps, mon mari souhaitait donc profiter du pont du 11 novembre (puisqu'il ne travaille pas lundi, lui !) pour s'y attaquer et éviter de laisser la maison "en chantier" plusieurs jours ou semaines s'il s'en occupait par intermittence le soir ou le week-end.
Et puis, comme les réaménagements prévus impliquent un changement de chambre pour Gaspard, nous voulons le préparer à l'arrivée de son petit frère suffisamment longtemps à l'avance pour qu'il ne soit pas trop perturbé et qu'il n'associe pas ce chamboulement à l'arrivée de Hector.
Ce soir, nous avons donc commencé à vider les meubles qui vont devoir changer de pièce pour l'arrivée de Hector. J'ai participé comme j'ai pu mais ai rapidement dû me contenter de regarder mon mari faire, mon bidon commençant à peser, surtout en fin de journée. J'aurais préféré pouvoir être plus active, ça m'aurait peut-être évité de cogiter...
Car l'aménagement que l'on entreprend pour accueillir Hector, c'est celui que nous aurions dû faire à notre entrée dans la maison il y a 13 mois, pour Élise et Gaspard. Nous disposons en effet d'une chambre au rez-de-chaussée, qui aurait dû être la nôtre dès le début et qui va désormais la devenir, et de deux chambres à l'étage, qui auraient dû être celles des grumeaux. En même temps, je suis heureuse de préparer tout ça pour Hector mais je ne peux m'empêcher de penser que les choses ne sont pas à leur place.
Et pour couronner le tout, l'angoisse inhérente à cette grossesse trouve dans ces remaniements un terreau fertile. À anticiper autant l'arrivée de Hector, moi qui ne suis pas superstitieuse, j'ai pourtant peur que ça ne nous porte malheur, comme si en rendant sa présence imminente un peu plus concrète, on jouait à provoquer le diable.
Nous préparons l'arrivée de Hector mais si c'est à lui qu'il arrive quelque chose ? Que fera-t-on si Hector n'arrive jamais dans sa chambre, dans son lit ?...
Combien ça coûte ?
Jeudi, aux Maternelles sur France 5, il était question du coût financier que représente l'arrivée d'un bébé et du système D que l'on peut déployer pour la préparer.
Nathalie Lebreton a parlé des résultats du sondage auquel ont répondu les téléspectateurs (on fera d'ailleurs semblant de ne pas avoir remarqué la faute de conjugaison !) :
Pour la grande majorité des parents, l'arrivée du premier enfant coûte au moins 4000€. Alors, quand j'entends ces questions plutôt anodines, je ne peux m'empêcher de me poser la question : "et chez nous, ça donne quoi ?".
Pour Gaspard, on nous a donné/prêté/offert beaucoup de choses alors nous en sommes très loin.
Pour Élise, c'est une autre histoire. Je vais peut-être choquer en évoquant ce sujet mais cela fait aussi partie de notre réalité de parents désenfantés.
Entre l'achat de la concession au cimetière, ses obsèques, la plaque provisoire en attendant l'érection du monument et le monument en question, nous avons dépensé pour Élise plus de 7000€ en moins de 8 mois. Il est certain que Gaspard aura besoin de plusieurs mois voire années pour rattraper cette somme.
Cela étant, je ne recherche pas l'apitoiement sur notre sort financier : ces dépenses, nous les avons "choisies".
Dans le cas d'Élise, puisqu'elle est née sans vie, nous aurions pu décider de ne pas nous occuper de ses obsèques mais cela était inconcevable pour nous.
Nous aurions pu préférer l'incinération mais cela ne nous correspond pas, à mon mari et à moi.
Nous aurions pu choisir une pierre plus courante mais nous ne voulions pas du gris moucheté que l'on retrouve partout.
Et si nous avons engagé ces dépenses, c'est que nous pouvons les assumer.
Je voulais juste vous en parler parce que c'est aussi ça, la réalité du deuil périnatal, aussi matérielle et triviale soit-elle.