25 juillet 2013

T'es beau - Sophie-Tith

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Une chanson pour mon homme, parce qu'elle me fait penser à lui...

T’es beau
T’es beau parce que t’es courageux
De regarder dans le fond des yeux
Celui qui te défie d’être heureux

T’es beau
T’es beau comme un cri silencieux
Vaillant comme un métal précieux
Qui se bat pour guérir de ses bleus

C’est comme une rengaine
Quelques notes à peine
Qui forcent mon cœur
Qui forcent ma joie
Quand je pense à toi
À présent

J’ai beau
J’ai beau me dire qu’au fond c’est mieux
Même si c’est encore douloureux
Je n’ai pas de recoin silencieux

C’est beau
C’est beau parce que c’est orageux
Avec ce temps je connais peu
Les mots qui traînent au coin de mes yeux

C’est comme une rengaine
Quelques notes à peine
Qui forcent mon cœur
Qui forcent ma joie
Quand je pense à toi

Toi qui sors de scène
Sans armes et sans haine
J’ai peur d’oublier
J’ai peur d’accepter
J’ai peur des vivants
À présent

T’es beau
T’es beau

C’est comme une rengaine
Quelques notes à peine
Qui forcent mon cœur
Qui forcent ma joie
Quand je pense à toi

Toi qui sors de scène
Sans armes et sans haine
J’ai peur d’oublier
J’ai peur d’accepter
J’ai peur des vivants
À présent

T’es beau
T’es beau parce que t’es courageux
De regarder dans le fond des yeux
Celui qui te défie d’être heureux

T’es beau
T’es beau comme un cri silencieux
Vaillant comme un métal précieux
Qui se bat pour guérir de ses bleus

T’es beau
T’es beau parce que t’es courageux
De regarder dans le fond des yeux
Celui qui te défie d’être heureux

T’es beau
T’es beau comme un cri silencieux
Vaillant comme un métal précieux
Qui se bat pour guérir de ses bleus

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La tentation de l'enfant parfait

Cet article intéressant bien qu'imparfait commence à dater (avril 2001) mais reste d'actualité...

http://www.lexpress.fr/actualite/sciences/sante/la-tentation-de-l-enfant-parfait_491426.html

La tentation de l'enfant parfait
Par Jacqueline Remy, Nathalie Tiberghien et publié le 19/04/2001

L'interruption médicale de grossesse autorisée par la loi est, a priori, destinée à éviter la naissance de bébés gravement malformés. Mais jusqu'à quel degré de handicap un enfant a-t-il droit à la vie ?

C'est une scène qu'on a envie d'oublier. De gommer vite, pour passer à autre chose. De celles que l'on ne souhaite à personne et qui pourtant peuvent arriver à chacun d'entre nous. Une scène aux frontières de la vie et de la mort : se prendre pour Dieu et juger si, oui ou non, un enfant - cet enfant-là, qu'on devine sur l'écran de l'échographiste - a le droit de vivre.  

Hôpital Arnaud-de-Villeneuve, à Montpellier. Ce mardi, le Dr Jean-Michel Faure, obstétricien, reçoit un couple dans son cabinet. Elle, la future mère, jeans et queue-de-cheval, 19 ans, va s'allonger. Lui, le père, lui tient la main. Enceinte de douze semaines, elle pleure. Son gynécologue l'a adressée au centre de diagnostic prénatal du CHU de Montpellier pour un examen approfondi. Il a repéré à l'échographie un décollement cutané au niveau du cou. Le Dr Faure vient de refaire l'échographie. Il confirme le diagnostic et préconise des examens supplémentaires, pour vérifier l'origine de l'anomalie du fœtus.  

- On va pratiquer une amniocentèse, explique-t-il. Lundi, on reparlera de l'anomalie présentée par le bébé.
- Il ne souffre pas ? implore la jeune femme. De toute façon, si c'est pour avoir un bébé qui ne peut pas vivre...
- C'est dur, soupire le médecin.
- Vous allez faire des tests ?
- Vous n'êtes pour rien dans ce qui arrive, mais il faut comprendre ce qui s'est passé. Dans 99% des cas, c'est un accident qui ne se reproduira pas lors d'une grossesse ultérieure.
- De toute façon, on ne peut rien faire ? demande le père.
- Je ne veux pas vous bercer d'illusions. Je sais que c'est très douloureux, c'est votre bébé. Il y aura une réunion avec les généticiens. On attend les résultats avant de décider si on fait une IMG, une interruption médicale de grossesse. 

L'IMG, c'est la rançon - et la récompense - des formidables progrès, depuis vingt ans, du diagnostic prénatal, grâce aux techniques de dépistage des anomalies fœtales, en particulier les échographies : au moins trois par grossesse sont remboursées par la Sécurité sociale. L'IMG, c'est le droit, accordé en France depuis la loi Veil, en 1975 - à une époque où le diagnostic prénatal existait à peine - d'interrompre une grossesse s'il existe une forte probabilité que l'enfant à naître soit atteint "d'une affection d'une particulière gravité, reconnue comme incurable au moment du diagnostic". L'IMG peut être pratiquée à n'importe quel stade de la grossesse et jusqu'à son terme - ce qui n'est le cas dans aucun autre pays. Aux États-Unis, on s'arrête à vingt-deux semaines, en Espagne à vingt-quatre, aux Pays-Bas à vingt-deux, en Grande-Bretagne à vingt-trois. L'IMG consiste à tuer le fœtus par injection, puis à le faire expulser ("accoucher", disent les obstétriciens) par la mère, si possible sous anesthésie péridurale. 

Les médecins peuvent proposer une IMG aux parents : ils n'ont pas le droit de l'imposer. Les parents peuvent demander une IMG aux médecins : ils n'ont pas le droit de l'exiger. Depuis la loi de bioéthique de 1994, cette autorisation d'avorter donnée par un médecin doit obligatoirement être contresignée par l'un de ses confrères expert auprès des tribunaux. Depuis août 1999, ces derniers sont tenus de prendre leur décision de façon collégiale, après consultation d'une équipe pluridisciplinaire relevant des 40 centres de diagnostic prénatal désormais répertoriés au Journal officiel. 

A Montpellier, tous les lundis en début d'après-midi, dans une salle du quatrième étage, se réunissent autour d'une grande table une quinzaine de personnes : le Pr Pierre Boulot, chef du service, des généticiens, le pédiatre, l'échographiste, le cardiologue, l'urologue, le neurologue, une pédopsychiatre. Ensemble, ils vont étudier les dossiers des couples qui souhaitent suspendre la vie de leur bébé, ou à qui il y a lieu de proposer l'IMG. Problème cardiaque, malformation congénitale, maladie génétique grave, cerveau anormal... Ici, on discute en moyenne huit dossiers par semaine. Ailleurs, jusqu'à une quinzaine de cas. La décision est parfois évidente, quand le bébé souffre d'une maladie terrible, mortelle à court terme. Elle est parfois beaucoup plus complexe. Parce que le diagnostic est incertain, ou le pronostic délicat. Parce que les membres de l'équipe ne sont pas forcément d'accord entre eux sur la position à adopter. Parce qu'ils savent que cette décision est déterminante pour l'avenir d'une famille. Et enfin parce qu'il leur arrive de s'opposer à la volonté des parents. En clair, tout le monde bute sur des questions éthiques compliquées et cruelles : jusqu'à quel degré de handicap un enfant doit-il être considéré comme "bon pour la vie" ? A partir de quelle anomalie a-t-on le droit de l'en exclure ? Et, surtout, qui doit décider : les parents, les médecins ou le législateur ? En cas de conflit, quel avis doit primer ? 

Des choix d'une crudité glaçante

La France est sans doute l'un des pays où l'on a le plus ambitieusement développé le diagnostic prénatal. C'est aussi celui où l'on pratique le plus d'IMG : 7000 par an en moyenne, entre le cinquième et le sixième mois de grossesse. Au début des années 80, les premiers échographistes avaient des équations relativement simples à résoudre : la technologie ne leur permettait de déceler que les très grosses malformations du fœtus. 

Puis, au fil du temps, on est parvenu à avoir une image de plus en plus précise, et précoce, du fœtus. La question de l'interruption de grossesse s'est posée de façon de plus en plus complexe. Très vite, il a fallu opérer des choix d'une crudité glaçante : si les parents refusent d'avoir un enfant nain ou trisomique, doit-on accéder à leur désir d'avorter ? Si leur bébé est atteint d'une maladie grave du cerveau, génératrice de prévisibles souffrances, doit-on convaincre une mère rétive d'interrompre sa grossesse ? Si le fœtus présente un bec-de-lièvre - opérable par la suite - ou une malformation de la main ou du pied que les parents rejettent violemment, doit-on leur imposer cet enfant ? Derrière ces dilemmes se profilent d'autres débats, plus collectifs, passionnants si l'on accepte d'en peser sereinement les enjeux éthiques. Question de rapports de force : entre la mère, qui porte le bébé dans son ventre, le père, qui endosse avec elle la responsabilité de l'enfant, le médecin, qui détient l'autorité scientifique, le législateur, qui pose les limites, comment doit se partager le pouvoir ? Doit-on obéir à la douleur, au désir, ou au savoir ? En fonction de quelle morale ? Jusqu'à quel point doit-on obtempérer à l'exigence moderne d'enfant parfait ? Ne risque-t-on pas de céder à la tentation eugéniste ? Doit-on mettre au monde des enfants que leur handicap risque de rendre terriblement malheureux, et leurs parents avec eux ? Ces questions-là sont d'autant plus d'actualité qu'elles sont abordées au détour de la réforme de la loi Veil, ces temps-ci discutée au Parlement, qui prévoit un allongement du délai pendant lequel on peut interrompre "volontairement" une grossesse, mordant donc de deux semaines sur des décisions qui relèvent aujourd'hui de l'IMG. Elles sont surtout agitées par les suites de l'arrêt Perruche. En novembre 2000, la Cour de cassation a donné raison à une caisse d'assurance-maladie et à des parents qui demandaient, au nom de leur enfant handicapé, une indemnisation pour le préjudice d'être né : en clair, si le cas Nicolas Perruche avait été convenablement diagnostiqué, les parents auraient demandé, et sans doute obtenu, une IMG. D'autres actions, intentées par d'autres parents au nom de leur enfant, sont en cours pour demander à la justice d'indemniser ces vies dont on aurait préféré se priver. 

Dans le quotidien des cabinets des échographistes ou des centres de diagnostic prénatal, ces questions surgissent toujours de façon sourde, dans un contexte d'émotion et de tragédie. "L'échographie n'est pas un acte médical, c'est une bombe que vous avez entre les mains, insiste François Farges, échographiste à Paris. Quand je diagnostique une malformation, chaque mot que je prononce est un traumatisme pour les parents. Il n'y a pas de bonne manière de donner une mauvaise nouvelle. Il faut prendre son temps." Alexandra Bénachi, chef de clinique dans le service du Pr Yves Dumez, à l'hôpital Necker, confirme : "Le plus dur, c'est d'annoncer aux gens qu'il y a une anomalie, de ne pas les influencer dans leur choix." En consultation, une femme sur deux, dit-elle, lui demande si elle a des enfants, et implore : "A ma place, que feriez-vous ?" Le Dr Bénachi élude: "Je ne suis pas à leur place. J'essaie de ne pas peser. Mais être objectif à 100%, c'est impossible." Dans un certain nombre de cas, les médecins ont du mal à être "objectifs", comme le dit Alexandra Bénachi : "C'est très dur de refuser une IMG à quelqu'un qui la réclame. Une femme à qui nous avons donné un avis négatif m'a lancé : "Très bien, madame, vous aurez ma mort sur la conscience!" A l'inverse, il est difficile de ne pas s'impliquer quand l'anomalie est gravissime. Parfois, on insiste lourdement, mais ce que nous considérons comme une catastrophe ne l'est pas forcément pour les parents. Et puis, il y a les cas où on ne sait pas très bien. Pour ce qui touche au cerveau, on nous trouve parfois lâches quand tout ce que l'on peut dire, c'est : "Il y a 50% de chances qu'il soit débile, 50% qu'il n'ait rien." 

Hôpital Necker. L'un des obstétriciens, Marc Dommergues, raconte comment, parfois, surgissent de "méga-prises de tête". Exemple : "On voit qu'il se passe quelque chose. Le bébé ne grandit pas bien, mais on ne s'explique pas pourquoi. Le placenta fonctionne, les os sont normaux, le caryotype aussi. On refait une échographie à trente-trois semaines et on décèle surtout un délit de sale gueule : le nez part en avant. On ne peut pas dire si c'est grave ou non. Comme on n'est pas sûr des anomalies, on s'assied dessus. On ne peut pas dire aux parents : "On a vu des choses, on ne sait pas ce que c'est, et vous n'aurez pas d'IMG car le comité d'éthique sera contre." 

Douloureux pour tout le monde

A Montpellier, la pédopsychiatre Françoise Molénat a lancé des programmes de formation pour impliquer les équipes des maternités et les aider à écouter les patients, à prendre du temps. Elle explique que, tout en évitant des drames terribles, l'IMG est une histoire douloureuse pour tout le monde : pour les parents, évidemment, pour les médecins, les sages-femmes, les infirmières, bref, le personnel. "L'IMG n'est pas une solution, dit-elle. On fait juste le moins pire." Et, quand ce "moins pire" n'est pas mesuré de la même façon par les différents protagonistes, il faut gérer le conflit. Confrontés à une malformation, les parents ne comprennent parfois pas que les médecins raisonnent pour un fœtus comme pour une personne : "Ils s'imaginent avoir tous les droits sur l'enfant, raconte le Pr Boulot. Il n'est pas né, donc il n'existe pas." "Et pourquoi faites-vous des échographies, si vous n'en tirez pas les conclusions ?" grondent-ils. "On va l'opérer, on va le soigner, on pourra l'appareiller", répond patiemment l'obstétricien. A l'inverse, pour des raisons religieuses, certains couples considèrent que leur bébé, même très mal formé, même s'il doit souffrir, même s'il doit leur en coûter, est sacré. Et ils refusent de le supprimer, malgré les mises en garde des médecins. 

N'est-ce pas à nous de décider ? se demandent, au fond, tous les parents. Cette question-là est aussi au cœur, implicitement, de la polémique sur l'allongement de dix à douze semaines du délai pendant lequel l'IVG, l'interruption de grossesse "volontaire", est, elle, autorisée. En juin 2000, le Pr Israël Nisand, auteur d'un rapport fameux sur la question mais hostile à l'allongement du délai, avait expliqué à la ministre d'alors, Martine Aubry, qu'on ne pouvait pas céder à toutes les demandes des parents. "En cas de bec-de-lièvre, avait-il dit, je refuse l'avortement." "Vous avez tort, avait répliqué la ministre, c'est à la femme de décider." 

Au Planning familial, mais aussi à l'Association nationale des centres d'IVG et de contraception (Ancic), on n'est pas loin de penser que les médecins abusent de leur pouvoir. "J'estime que c'est à la femme de décider d'une IMG, comme pour une IVG, en tout cas jusqu'à ce que le fœtus soit viable", affirme le Dr Paul Cesbron, président de l'Ancic. Justement, le bébé est viable de plus en plus tôt: "C'est choquant, soupire le Pr Dumez, on interrompt des enfants à trente-deux semaines, et on en fait naître à vingt-quatre semaines. Nous sommes écartelés entre deux pathologies." 

Mais les spécialistes du diagnostic prénatal pensent tous que la décision finale doit être prise par l'équipe médicale. Avec, en gros, quatre arguments. Les critères de l'IMG sont d'abord médicaux. Ce sont les médecins qui font le geste. Cela délivre en partie les parents d'une culpabilité trop lourde. Enfin, les médecins canalisent la tentation eugéniste, bien que beaucoup réfutent le terme, qualifié "d'abus de langage". Au moment de la discussion sur l'allongement du délai de l'IVG, le Pr Israël Nisand a stigmatisé publiquement le risque d'eugénisme. Et il expliquait à L'Expres s: "J'ai vu arriver un jeune couple à douze semaines pour un problème bénin à l'abdomen. J'ai refusé l'IMG. Mais ils ont obtenu la signature ailleurs. Et puis, j'ai des demandes pour un pied bot, pour le sexe, pour des jumeaux qu'on veut ramener à un. Les gens ont le droit de tout demander, mais les médecins n'ont pas le droit de tout accepter." Le Pr Boulot proteste : "Je ne me suis jamais livré à l'eugénisme. Vous croyez qu'on améliore la race ? En favorisant l'IMG, on permet aux parents de mettre en route d'autres enfants, sains, mais qui peuvent être porteurs du gène." Une fois son accès d'indignation passé, le médecin revient sur le sujet : "On ne fait pas d'eugénisme, sauf au sens courant du terme. On répond en effet à une préoccupation des parents qui, elle-même, correspond à une demande d'enfant parfait de la part de la société. Alors, qui mérite de vivre ou pas ? On a besoin de bases médicales solides pour répondre à cette question. Vous voulez qu'on tue votre enfant ? Donnez-nous de bons arguments. Est-ce parce que la société ne veut pas accueillir les handicapés ? Et si je supprime ces futurs handicapés, ne vais-je pas rendre les autres de moins en moins supportables ? Et les trisomiques, à quel seuil de handicap on les garde ? Je dis: "Ce n'est pas moi qui vais décider. Je ne veux pas assumer ce rôle seul. Voilà pourquoi nous fonctionnons en collège." 

Les conflits opposent, quelquefois, les futurs parents aux médecins. Ils opposent aussi, plus discrètement, les équipes médicales entre elles. Certaines sont plus laxistes ; d'autres, plus rigides. Cela se sait entre professionnels. Quant aux parents, ils le comprennent vite. Les IMG demandées en raison d'une amputation ou d'une malformation de membre sont plutôt refusées dans des centres, et acceptées du bout des lèvres, après discussion, dans d'autres. Il arrive ainsi que des couples errent pendant des jours d'un hôpital à l'autre, dans l'espoir de rencontrer une équipe compréhensive. Il arrive aussi que d'autres, furieux ou désespérés, foncent en Angleterre, aux Pays-Bas ou en Espagne, où l'on peut avorter plus tard qu'en France dans les conditions de l'IVG, sur décision de la mère. Compréhensible, et pourtant vertigineux. "L'esprit consommateur n'a pas de limites, déplore un obstétricien. On nous réclame des bons produits, et c'est à prendre ou à laisser." Et de citer Pascal Duquenne, le trisomique qui a décroché un prix d'interprétation au Festival de Cannes en 1996. Ainsi que la maladie osseuse de Michel Petrucciani, "qu'on ne garderait pas aujourd'hui si on le rencontrait en médecine néonatale". 

Pionniers d'une profession reconnue par l'université seulement depuis 1995, les spécialistes de médecine fœtale n'aiment guère s'attarder sur leurs dissensions. Il est vrai que les décrets régissant leur pratique sont récents et qu'un consensus se tisse peu à peu sur l'essentiel. L'IMG a longtemps été un sujet tabou, même chez les médecins, et l'on commence juste à sortir du silence. Avant, chacun faisait selon son cœur et sa morale. "A la demande", avoue l'un. "Le moins possible", admet l'autre. "La Société française de médecine périnatale existe depuis trente ans, raconte le Pr Boulot. Il aura fallu vingt-neuf ans pour que le sujet soit clairement abordé." 

Le bons sens profane voudrait que l'on dresse une liste des maladies, avec des seuils : ici, on avorte ; là, on n'avorte pas. La règle du jeu serait claire. En réalité, tous les spécialistes de médecine fœtale se félicitent qu'il n'y ait pas de nomenclature : "On a la meilleure loi du monde !" s'exclament-ils en chœur. Le Pr Jacques Milliez, de l'hôpital Saint-Antoine, à Paris : "Si l'accès à l'IMG était codifié, cela exclurait des malformations, qui seraient alors imposées aux parents." Tous les médecins le scandent, comme le Pr Dumez : "A handicap égal, les parents ne sont pas égaux. Chacun situe le seuil de l'intolérable à un niveau différent." 

Question de philosophie, de personnalité, de caractère, de culture, de milieu, de moyens financiers. Tous les praticiens expliquent qu'au-delà des principes ils tiennent compte du degré de détresse des parents. Plusieurs acceptent, in fine, des IMG pour des couples qui insistent, après avoir été refoulés par plusieurs hôpitaux, alors qu'ils auraient décliné leur demande en première instance. "Est-il dans nos fonctions d'arrêter la vie d'un enfant qui a une main en moins ? Non. Est-ce qu'il trouvera sa place dans un foyer dont les parents le rejettent ? s'interroge le Pr Boulot. C'est là la question. Il peut être éthique de dire oui à leur demande." A Saint-Antoine, le Pr Jacques Milliez raconte qu'il a refusé une IMG pour une agénésie (une atrophie) de la main droite. "Finalement, quand l'enfant est né, les parents ont oublié leur demande initiale, raconte le médecin. Ils n'ont vu que ce qui était parfait, et l'ont immédiatement aimé. Mais, dans une situation analogue, certains parents refusent à tout prix de faire naître cet enfant. Le prix serait la dissolution du couple et des risques pour la santé mentale de toute la famille. Dans ces conditions, avec la caution d'un expert psychiatre, j'accepte d'interrompre la grossesse. Je ne veux pas qu'on m'accuse de non-assistance à personne en danger." 

Certains patrons sont soulagés de s'en remettre à un collège pluridisciplinaire pour affermir leur décision, en réunion, chaque semaine, dossier après dossier. D'autres, comme le Pr Dumez, critiquent assez vertement le formalisme de ces confrères : "Certains staffs se réunissent autour d'une table, comme au tribunal. L'IMG est un acte terrible, le plus terrible de la médecine. En décider sans voir le patient, cela me choque. On finit par s'intéresser davantage à l'anomalie qu'à l'individu." Il ajoute, coup de pied de l'âne : "Comme le patron est le mâle dominant, tout le monde se range à son avis." Comment fait-on donc, à Necker ? On discute en équipe, de façon informelle, mais c'est la personne qui a vu le patient qui prendra la décision finale. 

Ne rien escamoter

"Aujourd'hui, nous refusons seulement 10% des demandes d'IMG, assure le Pr Boulot, alors que nous en rejetions 20% il y a quelques années." Ailleurs, ce sera peut-être l'inverse. Dans les centres parisiens, 70% des trisomies 21 sont décelées en cours de grossesse: l'IMG est proposée, 8% des parents la refusent. La plupart des patrons de centre affirment qu'ils réduisent au minimum les cas de conflit, en les gérant aussi humainement que possible. Tous ont évolué : "Avant, j'avais du mal à comprendre les parents qui refusaient l'IMG pour une trisomie 21, avoue le Pr Dumez. Quand le bébé présentait en plus une anomalie cardiaque grave, je me disais : l'opère-t-on ou est-ce l'occasion de s'en débarrasser ?" Ensemble, les équipes réfléchissent à ce qu'elles font avec l'aide des psys. Elles essaient d'accompagner les patients de mots, de douceur, d'information, de rituels, et - pour les meilleures - d'infiniment d'attention. Au fond, toute décision est acceptable. Tout dépend du sens qu'on lui donne. La pédopsychiatre Françoise Molénat explique que, dans cette affaire de vie et de mort, il ne faut rien escamoter. 

Retour au cabinet de Jean-Michel Faure, à l'hôpital de Montpellier. Enceinte de cinq mois, la mère a le visage fermé. Le père se tait.
- Votre gynécologue vous a adressés à moi pour que j'évalue ce qu'a votre bébé. Que vous a-t-il dit ?
- Qu'il n'a pas d'estomac, pas de maxillaire inférieur et une malformation au niveau de l'aorte. Tout de suite, ma réaction a été l'avortement, si on peut... Pourquoi vous dites bébé, et pas fœtus ?
- Parce que c'est un bébé.
- Cela veut dire qu'il va falloir le déclarer? C'est un fœtus, pas un bébé.
- Pour moi, c'est un bébé, qui a un ensemble de malformations très graves. Il bouge énormément...

- Ça va être encore long ?
- C'est bientôt fini. Il y a un problème au niveau de la mandibule...
- Est-ce que je suis obligée d'entendre le détail ? s'impatiente la jeune femme.
- Moi, je ne peux pas faire une croix sur cet enfant comme ça. Je suis obligé de vous dire ce qui se passe. [...] Il va falloir faire une enquête génétique pour savoir si cela risque de se reproduire lors des prochaines grossesses. On ne peut le faire que tant que la grossesse se poursuit. Il faudra attendre jusqu'à lundi prochain pour prendre une décision.
- Il souffre peut-être, proteste-t-elle. Moi, ça va, je vous garantis que je suis solide.
- Je vous garantis qu'aucune mère n'est assez solide pour perdre son enfant.

- J'avais senti que cela se passait mal. Je n'ai jamais rien acheté pour le bébé.
- Justement, vous l'avez senti, ce qui prouve que vous étiez mère dès le début.  

Les équipes qui se soucient d'accompagner les parents ne cherchent pas à leur épargner des épreuves. Au contraire. Pour éviter que les couples ne soient ultérieurement taraudés par la culpabilité - comme le raconte bien la psychanalyste Muriel Flis-Trèves (Deuil de maternité, Plon) - on les aide à regarder en face ce qu'ils vivent. On évite d'embrayer sur la réaction la plus courante : se débarrasser de "ça", vite. On les contraint à prendre le temps d'encaisser. On leur permet de revenir sur leur choix. Avant "l'accouchement", on essaie de leur dire la vérité, même si c'est pénible d'annoncer, et d'entendre, qu'on va injecter un liquide fœticide. Après, on leur propose de rencontrer leur enfant mort. "Quand les mères le voient, raconte Annie Le Berre, infirmière, elles se mettent à pleurer, mais elles disent toutes que ça les a soulagées. Sinon, elles s'imagineront pendant des années des choses horribles." Enfin, on leur demande l'autorisation pour l'autopsie, nécessaire pour confirmer le diagnostic (95% de oui). 

Cela ne se passe pas bien partout. Souvent, on annonce aux futures mères par téléphone que leur enfant présente une anomalie grave. On les ballotte de spécialiste en spécialiste, au gré des incertitudes du diagnostic. On leur demande de décider quand elles préféreraient, parfois, qu'on décide pour elles. Et inversement. Certaines accouchent seules dans leur lit, sans anesthésie ou, au contraire, complètement endormies. "J'étais à six mois et demi quand on a décelé une grosseur au cerveau, raconte Florence. Entre le moment où j'ai su et l'intervention, cela a duré un mois et demi. L'attente était peut-être nécessaire, mais c'était une torture." Aujourd'hui, elle participe à l'un de ces groupes de parole qui commencent à s'organiser et permettent aux parents d'échanger leurs expériences et de faire convenablement leur deuil. Chantal Haussaire-Niquet est l'une de ces traumatisées de l'IMG, une histoire triste dont elle a fait le récit dans un livre (L'Enfant interrompu, Flammarion). Elle milite aujourd'hui, et d'autres avec elle, pour que les fœtus puissent être déclarés à l'état civil et enterrés normalement à tout âge. Aujourd'hui, ce n'est possible qu'à partir de six mois après la conception. 

Toutes ces réflexions, qu'elles naissent chez les parents ou qu'elles s'élaborent dans les services, tournent aujourd'hui autour d'une même obsession : quoi que l'on décide, il faut que tout cela ait un sens. Nous ne sommes pas des distributeurs automatiques de bébés "nickel", disent les médecins, soulignant que de 30 à 40% des anomalies fœtales, aujourd'hui, ne sont toujours pas décelées en cours de grossesse. Nous ne sommes pas des objets que l'on peut manipuler sans respect, répondent les patients. L'enfant est une personne, mais la mère aussi, et le médecin itou. Un équilibre fragile, sur des incertitudes compensées par beaucoup d'humanité. Il suffirait d'un rien - une rafale d'arrêts Perruche, un décret malencontreux, l'abandon d'un garde-fou, une crise de démagogie - pour que tout le monde vacille.

L'express

Rien que le titre me dérange : l'écart est-il si faible entre un "enfant parfait" et un enfant sans espérance de vie, condamné à souffrir ou qui ne pourra jamais apprendre à vivre ? Mais il faut bien accrocher le lecteur, me direz-vous...

L'article se concentre sur les cas les plus "faciles" où l'on sait ce qui attend l'enfant et ses parents et où la tentation de blâmer ces derniers est grande, quand on n'a pas à se poser la question. Mais quid des cas plus complexes, plus incertains où les parents doivent décider sans savoir ?

Combien de Pascal Duquenne ou de Michel Petrucciani parmi tous les enfants pour qui la question de l'IMG se pose ? Comme il est facile de prendre un ou deux contre-exemples pour faire vaciller une règle...

Et, comme souvent, l'article n'aborde nullement la question de l'IMG en cas de grossesse multiple.
Je sais que l'IMG est encore un sujet tabou, confidentiel, dérangeant pour ceux qui n'y sont pas confrontés.
Je sais que les familles concernées par la question de l'IMG sont peu nombreuses.
Je sais que, parmi ces familles, les cas de grossesse multiple sont encore moins nombreux.
Mais ce sentiment d'exception ajoute encore à la douleur et à la détresse...

24 juillet 2013

Tears in heaven - Eric Clapton

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Une chanson qu'Eric Clapton a écrite suite à la mort accidentelle de son fils de 4 ans et que tous les parents désenfantés peuvent s'approprier...
Would you know my name
If I saw you in heaven
Would it be the same
If I saw you in heaven

I must be strong
And carry on
'Cause I know I don't belong
Here in heaven

Would you hold my hand
If I saw you in heaven
Would you help me stand
If I saw you in heaven

I'll find my way
Through night and day
'Cause I know I just can't stay
Here in heaven

Time can bring you down
Time can bend your knees
Time can break your heart
Have you begging please, begging please

Beyond the door
There's peace I'm sure
And I know there'll be no more
Tears in heaven

Would you know my name
If I saw you in heaven
Would it be the same
If I saw you in heaven
I must be strong
And carry on
'Cause I know I don't belong
Here in heaven

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L'association Petite Émilie

Je ne peux que vous encourager à consulter le site de l'association Petite Émilie, dont le but est de soutenir et accompagner les personnes confrontées à une interruption médicale de grossesse et, plus largement, au deuil périnatal.

 

Petite Émilie

 

http://www.petiteemilie.org/
En particulier cette page :
http://www.petiteemilie.org/index.php?option=com_content&task=view&id=29&Itemid=106

Extrait de la dernière newsletter de l'association :

Décider de garder un enfant que l’on sait très lourdement handicapé physique ou mental fait partie de ces décisions que l’on prend, péremptoire, avec beaucoup d’aplomb et de facilité lorsque le problème ne se pose pas. Pour les uns, ce sera évidemment, pour les autres évidemment pas, et pour tous, un choix d’autant plus simple que notre conviction est profonde. Sauf qu’un jour la vie vous rattrape et celle de votre enfant à naître est condamnée avant même d’avoir commencé.


21 juillet 2013

Préparation à la naissance - Épisode 2

Hier, c'était notre deuxième séance de préparation à l'accouchement, notre première en piscine.

Par ce temps et ces températures, c'était un vrai bonheur d'infuser pendant une heure, de 9h à 10h, dans une eau à la température aussi agréable ! La piscine n'ouvrant au public qu'à 11h, nous avions non seulement l'ensemble des bassins pour nous mais avons également pu profiter d'une piscine calme, sans agitation ni bruits. Bref, un réel moment de détente pour le corps et l'esprit.

Nous étions une dizaine de mamans, dont plusieurs "habituées" + trois papas, dont mon mari, mais n'avons retrouvé aucune des mamans de notre première séance "classique". Entre assouplissement du bassin, exercices de respiration et 10 minutes de relaxation à la fin, la séance a passé trop vite ! Heureusement, je remets ça dès la semaine prochaine, sans mon homme cette fois puisqu'il sera à l'enterrement de vie de garçon de mon frère.

La mauvaise surprise, c'est en sortant de l'eau que je l'ai eue : comme je me sentais lourde et comme mon bidon était pesant après une heure où j'avais pu oublier les lois de l'attraction terrestre ! ;-)

Enfin, cette première séance en piscine a été pour moi l'occasion d'étrenner mon nouveau maillot de bain "cache-misère" (comprendre les griffes de tigre auxquelles ressemblent mes charmantes vergetures abdominales - je vous les montrerai peut-être un jour !). Ce tankini commandé sur émoi émoi (en soldes, en plus !) m'a donné entière satisfaction : agréable à porter, poitrine bien maintenue (ce qui n'est pas du luxe !), bien coupé, partie abdominale bien couvrante et qui laisse de la marge au bidon. 10/10 !

Maillot de bain

19 juillet 2013

Neuvième échographie

Lors de la dernière échographie, il a été décidé, en accord avec le Dr Brasseur puis avec le Pr Marret, de pratiquer une échographie toutes les deux semaines pour surveiller la dilatation ventriculaire d'Élise.

Nous avons donc passé notre neuvième échographie hier, avec le Dr Brasseur. La dilatation d'Élise est relativement stable : ses ventricules font 25 et 27 mm, contre 25 mm tous les deux il y a deux semaines. Quand nous avons demandé au Dr Brasseur ce qu'il fallait penser de la quasi-stagnation de cette dilatation, elle a été claire : elle ne permet en aucun cas de se réjouir ou d'être rassurés, la dilatation restant sévère et le développement du cerveau toujours aussi négativement incertain.

La croissance d'Élise comme de Gaspard se poursuit par ailleurs tout à fait normalement. Tandis que Gaspard est dans la moyenne, Élise est toujours un peu plus petite, à un décalage près : sa tête est un peu plus grosse que celle de son frère. Il paraît même que Gaspard est "un beau bébé pour un jumeau" : continue comme ça mon p'tit loup :-)

Echographe

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17 juillet 2013

Accepter l'inacceptable

Légalement, c'est aux parents de demander l'interruption médicale de grossesse et aux médecins d'accéder ou non à cette demande. Mais dans ma tête, je ne peux admettre que nous demandions d'arrêter le cœur de notre fille. C'est pourquoi je parle toujours, en notre nom, d'accepter ou de refuser l'IMG. Vous pouvez trouver ça égoïste ou hypocrite mais c'est aussi une façon de se protéger...

Chemins

Accepter ou refuser l'IMG ?

Comment accepter que mon ventre devienne à la fois berceau et tombeau ?

Est-ce que j'ai le droit de refuser l'IMG juste parce que je veux m'épargner d'avoir à porter et mettre au monde un enfant mort ?

Comment accepter de laisser Élise grandir et vivre dans mon ventre si on la sait condamnée ?

Selon moi, on fait des enfants pour être heureux : est-ce que nous serons forcément malheureux si Élise est handicapée ?

Est-ce que nous avons le droit de ne pas accueillir Élise juste parce qu'elle ne rentre pas dans le moule de la vie de famille dont nous rêvions ?

Que deviendra Élise, lorsque nous ne serons plus là, si elle n'est pas autonome ?

Les médecins disent que, pour l'instant, Élise ne souffre ni physiquement, ni mentalement dans mon ventre. Mais qu'en sera-t-il si elle vient au monde ?
Est-ce qu'elle souffrira physiquement de sa dilatation ?
Si Élise est au moins partiellement consciente d'elle-même et de son environnement, est-ce qu'elle souffrira mentalement ? Est-ce qu'elle sera malheureuse ? Est-ce qu'elle nous reprochera de l'avoir laissée venir au monde ?

Ce n'est pas comme si Élise souffrait d'une pathologie fatale qui la rendrait non viable à plus ou moins court terme : c'est à nous de décider de vie ou de mort sur notre fille.

Accepter l'IMG, c'est penser à elle ou à nous ?

Dire que nous acceptons l'IMG pour elle, est-ce que ce n'est pas hypocrite ?

Si nous gardons Élise, il y aura toujours des gens pour nous reprocher la "vie au rabais" qu'on lui offre.
Si nous ne gardons pas Élise,il y aura toujours des gens pour nous reprocher de nous être débarrassés d'elle.

Accepter l'IMG...

Quand on nous demandera combien nous avons d'enfants, qu'est-ce que nous répondrons ? Comment se protéger sans nier l'existence d'Élise ?
Déjà aujourd'hui, je voudrais parfois répondre aux gens que je n'attends qu'un garçon, non pas pour nier et rejeter ma fille mais pour me protéger, pour l'après...
Qu'est-ce que nous allons dire à tous ces gens qui savent simplement que nous attendons des jumeaux quand nous les reverrons après l'accouchement ?

De façon un peu anecdotique et nombriliste, je me réjouissais tellement d'être une maman de jumeaux, que l'on devienne des parents un peu à part. Pour le coup, on va vraiment devenir des parents à part...

Alors que l'IMG n'est toujours pas une évidence pour moi (le sera-t-elle un jour ?...), j'ai l'impression qu'elle est de toutes façons inéluctable, que la décision d'accepter l'IMG ne vient pas et ne viendra pas de moi mais que je ne pourrai y échapper.

J'ai le sentiment d'être la seule à ne pas vouloir interrompre la vie d'Élise...  Mais peut-être que je m'en persuade pour me protéger, pour me donner "le beau rôle" de la mère courage qui est la seule à vouloir garder son enfant... Peut-être que je m'autorise à penser que je veux la garder parce que je sais qu'au fond de moi, ça n'arrivera pas... Je ne sais même plus faire la part des choses, au fond de mon cœur et de ma tête.

J'ai l'impression que l'IMG est inévitable et que c'est à moi de cheminer vers cette décision. J'ai l'impression que les semaines qui nous séparent de la fin de cette grossesse ne doivent pas me servir à savoir ce que je veux vraiment mais à accepter l'IMG.

 

Je ne veux pas qu'on nous dise que nous avons pris la bonne décision ; il n'y a pas de bonne décision.
Je ne veux pas qu'on nous dise que nous avons pris cette décision pour elle ; je n'en suis pas sûre.
Je ne veux pas qu'on nous dise que c'est mieux comme ça ; il n'y a pas de mieux dans cette histoire, il n'y a que du pire.
Je ne veux pas qu'on nous dise que nous nous en remettrons et que le temps fera son œuvre ; on ne se remet jamais de la perte d'un enfant.

Beaucoup de questions, quelques réponses

Suite à notre dernier rendez-vous avec le Professeur Marret avant notre semaine de répit, nous avions demandé à rencontrer à nouveau le Professeur Verspyck afin de discuter de l'interruption de grossesse, sans que cette demande d'entretien n'ait valeur de décision de notre part. Lors de notre rendez-vous d'hier, nous avons pu lui poser nos questions et obtenir quelques réponses.

Questions

Quand aura lieu l'IMG, dans notre cas ?
Comme le Professeur Marret nous l'a déjà expliqué et comme nous l'avons déjà bien compris : le plus tard possible, pour préserver Gaspard au maximum. Le Professeur Verspyck a été plutôt explicite concernant les risques liés à la prématurité, qu'avait évoqués le Professeur Marret : immaturité des organes, retard mental, retard moteur.
Cela veut dire que l'IMG puis l'accouchement auraient lieu, a priori, vers la deuxième quinzaine de septembre.

Si l'IMG est envisagée vers la mi-septembre, combien de temps avant devrons-nous communiquer notre décision ?
Quand nous le voudrons, quand nous serons prêts.

Combien de temps est-ce que je vais garder Élise morte dans mon ventre ?
Le Professeur Verspyck a parlé d'une quinzaine de jours entre l'IMG et l'accouchement mais nous n'avons pas bien compris pourquoi. À choisir, je préfèrerais que l'IMG et l'accouchement s'enchaînent le plus rapidement possible, quitte à retarder l'IMG.

Comment se passe l'IMG en elle-même ?
Comme pour une amniocentèse, ils introduisent une aiguille dans le ventre de la maman pour atteindre le bébé, lui injecter d'abord un produit anesthésiant puis un produit destiné à arrêter son cœur.
Lors de l'amniocentèse, j'avais réussi à rester calme et immobile mais je ne sais pas si je serai aussi forte pour un tel geste...

Est-ce que le papa pourra être présent à mes côtés lors de l'IMG ?
Le Professeur Verspyck nous a assuré que oui, ce qui nous a rassurés, la présence du papa n'étant pas possible dans certains hôpitaux, d'après les témoignages que j'ai déjà lus.

Est-ce que nous pourrons voir notre fille après l'accouchement ?
Le Professeur Verspyck nous l'a confirmé, précisant même qu'ils conseillaient aux parents de voir leur enfant, pour l'accueillir en tant qu'enfant et pour faciliter (si tant est que cela soit possible) le travail de deuil.

Est-ce qu'Élise sera autopsiée ?
Ils le proposent, c'est aux parents d'accepter ou non.
Nous savons déjà que nous souhaitons cette autopsie.
D'abord pour Élise et pour nous : pour essayer de déterminer ce qu'elle a et éventuellement écarter tout risque, s'il existe et s'il est décelable, de récidive lors d'une prochaine grossesse.
Ensuite pour les autres : pour qu'Élise puisse aider, dans une infime mesure, la recherche.

Est-ce que nous pourrons passer une échographie 3D avant l'accouchement pour nous préparer à l'apparence physique d'Élise ?
Le Professeur Verspyck n'a répondu ni par la négative ni par l'affirmative (comme à son habitude) mais nous avons bien compris qu'il n'y voyait pas forcément d'intérêt. Selon lui, même en cas d'anomalies physiques aussi marquées et visibles que celle(s) d'Élise, les parents ne sont pas traumatisés par l'apparence de leur enfant.

Est-ce que l'on peut déjà savoir quel bébé viendra en premier ?
Il est trop tôt pour le savoir.

Est-ce que l'on peut déjà savoir si l'accouchement se fera par voie basse ou par césarienne ?
Là encore, il est trop tôt pour le savoir.
Sans le dire explicitement, le Professeur Verspyck nous a fait comprendre qu'une des indications possibles de la césarienne serait que la dilatation ventriculaire d'Élise évolue à un point tel que sa tête ne passerait pas par voie basse, pour parler trivialement.

 

Au cours de l'entretien, j'ai exprimé à voix haute une réflexion que mon mari et moi nous faisons depuis le début et depuis qu'ils nous disent qu'ils ne savent pas (et ne sauront probablement pas avant l'accouchement, si tant est qu'ils parviennent à savoir un jour) de quoi souffre Élise : si les médecins étaient capables de nous dire "il s'agit de telle pathologie, avec telles difficultés et tels handicaps attendus", ce serait "plus facile" puisqu'il nous "suffirait" alors de décider si nous sommes capables d'assumer la situation exposée, alors que les incertitudes qui entourent sa pathologie et les difficultés et handicaps à venir nous conduisent à considérer la situation comme un pari. C'est alors que le Professeur Verspyck a rectifié les choses : pour lui, il est certain qu'Élise souffrira d'un handicap impossible à évaluer précisément certes mais qui sera au mieux modéré, au pire sévère, qu'elle ne pourra probablement pas suivre une scolarité classique même en maternelle, qu'elle sera incapable de marcher. Je crois que je n'avais pas encore pris (ou pas encore voulu prendre) conscience de la gravité du handicap dont elle pourrait être atteinte. Sans se transformer en déclic, ses propos m'ont fait un électrochoc.

Au détour de ces questions, le Professeur Verspyck nous a informés que l'étude pangénomique qui avait été lancée 3 semaines plus tôt n'avait rien donné : aucune anomalie n'a été détectée, suite au "zoom" sur les chromosomes d'Élise. Cela ne veut pas dire que l'origine génétique ou chromosomique des malformations d'Élise est définitivement écartée ; cela veut simplement dire qu'ils n'ont rien trouvé, en l'état actuel de leurs recherches et possibilités. Peut-être que l'autopsie permettra de rechercher ailleurs ou autrement et d'identifier quelque chose.

Le Professeur Verspyck nous a par ailleurs rappelé que, si nous sollicitions l'interruption de la grossesse d'Élise, notre demande serait acceptée. En effet, ce n'est pas aux médecins de proposer l'IMG mais aux parents d'en faire la demande - demande qui doit ensuite être examinée et acceptée ou refusée par un centre de diagnostic prénatal pluridisciplinaire, structure qui existe au sein de l'hôpital où nous sommes suivis.

16 juillet 2013

Toutes les larmes du monde n'y suffiront pas

Si toutes les larmes que je verse pouvaient évacuer le liquide céphalo-rachidien d'Élise, faire les vases communicants avec ses ventricules, résorber sa dilatation...

Larme

Posté par Tannabelle à 20:22 - - Commentaires [1] - Permalien [#]
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