La seule, l'unique !
Ce soir, nous avons parlé d'Élise à table. Jusque-là, rien d'extraordinaire. À un moment, Gaspard a tilté, tout fier : "Eh ! Je connais 3 Élise : Mme F., notre sœur et la collègue de Papa !"
La première, c'est sa maîtresse de l'an dernier et la maîtresse de Hector cette année.
Quant à la troisième, c'est effectivement une ancienne collègue de mon mari (coucou Élise !), dont le fils est d'ailleurs né le jour où le cœur de notre Élise a cessé de battre, mais c'est une autre histoire ! ;-)
Et Hector de s'exclamer, sa voix trahissant à la fois inquiétude et offuscation : "Non, Mme F. pas Élise ! Élise, ma sœur !"
Oui, tu as raison mon chaton, pour nous il n'y aura toujours qu'une seule Élise ! <3
Fallait pas me chercher !
Et bim, colère et tristesse du jour canalisées dans un mail de "retour à l'envoyeur"... y avait longtemps !
À cette requête impersonnelle et faussement sincère :
Bonjour,
Comme votre blog concerne le monde des enfants... Je me permets de vous faire découvrir nos 6 livres en PDF sur l'éveil musical sur le site blablabla.
Peut-être pourriez-vous en parler dans votre blog? Vos lectrices et lecteurs peuvent être intéressés par ce type de supports bien utiles à la maison ou à l'école. Dès que vous en avez parlé ou juste mis un lien vers notre site internet et pour vous en remercier, je peux vous offrir 3 livres en PDF (valeur 30 euros) pour vous uniquement ou pour 3 de vos lecteurs par l'intermédiaire d'une question ou d'un concours... C'est vous qui decidez !
merci pour votre écoute,
Nicolas
... j'ai répondu avec mon amabilité habituelle :
PS : on ne peut pas tout sacrifier sur l'autel de la rentabilité et de la publicité à tout va !
Pas plus que l'écume
- Je n'aurai pas duré plus que l'écume
- Aux lèvres de la vague sur le sable
- Né sous aucune étoile un soir sans lune
- Mon nom ne fut qu'un sanglot périssable
Yvan Goll
4 ans aujourd'hui que tu es MORTE...
Quand c'est pas l'un...
... c'est l'autre !
Hector semble en effet suivre les traces de son frère sur le chemin de la pipeletterie. Et pas plus tard que ce matin, il y est allé de son petit coup de poignard verbal dans mon cœur cabossé de maman.
Sur le trajet de la crèche, Gaspard, pour changer, a lancé la discussion sur la mort (à part ça, il semble plutôt bien dans ses sandalettes, je vous rassure !) en commentant : "Nous, on sera morts dans trèèèèèèèès longtemps, quand on sera grands, grands, grands !". Tandis que ma bouche a timidement confirmé, mon cœur s'est contenté d'espérer qu'il en serait ainsi.
Et Hector, d'ordinaire plutôt indifférent à ce genre de conversation, de rebondir : "Élise mort grand !".
Je n'ai pas eu d'autre choix que de le détromper : "Non, Élise était encore toute petite quand elle est morte, c'était un bébé."
Voilà mes amours, vous êtes en train de découvrir la cruauté de la vie et l'ambiguïté du discours de vos parents : "en général, on grandit avant de mourir, mais pour votre sœur, ça ne s'est pas passé comme ça".
On récolte ce que l'on sème
Hier matin, profitant d'un instant d'inattention et d'une fenêtre ouverte, notre chat s'est payé une escapade improvisée dans le quartier, juste avant le départ pour la crèche, l'école et le travail évidemment ! Pour éviter tout retard à l'école, j'ai emmené les enfants et laissé mon mari chercher après le chat. Sur la route, nous avons parlé de cette mini-fugue, que Gaspard a commentée ainsi, presque le sourire aux lèvres : "Si elle va sur la route, elle va se faire écraser". Me rendant bien compte qu'il n'en saisissait pas toutes les conséquences, j'ai alors expliqué que si elle se faisait écraser, elle risquait de mourir et que nous risquions de ne plus l'avoir/la voir. Et mon petit bonhonne de rétorquer tout de go : "Oui, mais on pourra la voir en photo".
Mon Gaspard a bien retenu ce que nous lui répondons lorsqu'il nous dit vouloir voir sa sœur : "on ne peut plus la voir en vrai parce qu'elle est morte, mais on peut la voir en photo".
Et ce matin, en arrivant à l'école, Gaspard qui me sort, une fois encore de but en blanc : "là tout de suite, Élise, elle est morte".
Moi : "Oui, effectivement."
Gaspard : "Et des fois, ça nous rend tristes et des fois, ça nous rend pas tristes."
Moi : "Et alors ce matin, ça te rend comment ?"
Gaspard : "Aujourd'hui, ça me rend pas triste."
Ouf, il semblerait qu'il ne gère pas trop mal ses émotions par rapport à Élise et qu'il s'autorise à les vivre et les exprimer, quelles qu'elles soient.
Eh bien, ces deux anecdotes sont pour moi des petites victoires sur notre chemin de famille endeuillée ! :-)
Comme par surprise
Grâce à une certaine rencontre fin 2016, qui a peut-être éveillé des choses en toi, ou eu un simple effet placebo, ou purement coïncidé avec le bon moment au fond de toi.
Grâce au sport, auquel tu t'es enfin mise, depuis plusieurs mois, assidûment, et qui te fait du bien physiquement et mentalement.
Grâce au temps qui passe, aussi, certainement.
Et puis tu la vois arriver, l'air de rien. Tu te dis que ça va aller, que ton moral est suffisamment solide par ailleurs pour réussir à l'affronter, que tu ne vas pas poser un genou à terre juste à cause d'elle.
À mesure qu'elle se rapproche, tu l'observes, la toises, la guettes, comme pour la défier, et te rassurer un peu, aussi.
Tu ne parles pas d'elle, comme pour lui donner moins d'emprise sur toi.
Et finalement, elle est là. Tu te retrouves au pied du mur, tu ne peux plus l'éviter ni faire semblant et tu te la prends en pleine face, comme sans t'y attendre, comme si tu ne l'avais pas vue arriver, comme si tu croyais pouvoir la rayer, chaque année, de ta vie, de tes souvenirs et de tes pensées.
Cette putain de date anniversaire.
Cette putain de date qui a fait basculer ta vie, il y a quatre ans.
Celle qui n'arrive pas qu'aux autres, finalement.
Celle qui a donné un sexe, un prénom... et des malformations à ta fille.
Celle qui a rendu ta fille malade.
Celle qui a rendu ta fille mortelle.
Bracelet
À l'occasion du premier Noël après la mort d'Élise, mon mari m'avait offert un bracelet en forme d'étoile constellé de petits brillants. Au fil du temps, les brillants sont tombés. Au début, j'en étais très attristée, car je voulais que tout ce qui concerne Élise reste intact, pur, beau. Je ne supportais pas que quoi que ce soit qui la concerne puisse être souillé ou abîmé. Finalement, devant l'inévitable, je me suis résignée.
Aujourd'hui - et cela fait un moment maintenant, sur les quelques dizaines de brillants originels, il n'en reste que... cinq. Comme la composition réelle de notre famille actuellement (car, comme vous l'avez compris, les espoirs du mois de février ont finalement été balayés. J'aurai sans doute prochainement l'occasion de vous donner des nouvelles à ce sujet, dans un sens ou dans l'autre !). J'y vois un signe ! De quoi, je n'en sais rien, mais j'en profite avant que le prochain brillant ne se fasse la malle !
Et pour parfaire ce clin d'œil, ces cinq brillants particulièrement résistants ne sont pas disposés de façon anodine : trois brillants isolés et deux brillants ... accolés ! Si ça ce n'est pas un signe !... ;-)
... et trois jours !
Ce soir, Gaspard a choisi un livre autrement plus réjouissant (enfin, pour être tout à fait honnête, je dois vous dire qu'il avait choisi - en première intention - Une chanson pour l'oiseau - en deuxième intention - le livre qu'il avait lu hier soir avec son père : retoqué à chaque fois, pour différentes raisons facilement compréhensibles !) : Devine combien je t'aime.
Avant de commencer à lire, je lui souffle : "Tu sais combien je t'aime ? Je t'aime jusqu'à la lune !"
Et lui de rajouter : "Et trois jours !"
Hum... Kamoulox ! ^^
Tristesse à la pelle
Un soir de la semaine dernière, Gaspard a choisi - pour la première fois, alors que le livre est dans sa bibliothèque depuis plusieurs mois - comme lecture avant de dormir "Une chanson pour l'oiseau", un livre imagé qui parle du deuil à travers la mort d'un oiseau, qui se fait recueillir et offrir une sépulture par des enfants.
À un moment de l'histoire, les enfants s'en vont creuser eux-mêmes sa tombe dans la forêt. Voulant faire le parallèle avec sa sœur pour l'aider à comprendre, je lui explique que c'est comme pour Élise, qu'elle aussi a une tombe, que c'est justement sur sa tombe que nous allons quand nous nous rendons au cimetière, etc. Et Gaspard de me rétorquer, à la vue de cette page : "moi aussi, j'ai porté la pelle pour Élise !"
Hum, alors comment te dire Mon Amour, quand la tombe de ta sœur a été creusée, tu avais... 4 jours ! Alors non, tu n'as pas porté la pelle !
Le petit garçon qui n'aimait pas le coiffeur
... on pourrait croire que je vous dévoile en avant-première le titre du dernier roman de Jonas Jonasson. Que nenni ! Je vais plutôt vous raconter une anecdote-pas-si-anecdotique-à-mes-yeux qui concerne Hector et son dernier passage chez le coiffeur.
Cela fait des mois que Hector a une peur bleue du coiffeur (et de tout ce qui touche de près ou de loin à ses cheveux). Pourquoi ? Bonne question ! J'ai l'impression que cela coïncide avec son hospitalisation de 24 heures il y a un an pour déshydratation suite à une gastro sévère, qui a par ailleurs marqué le début de sa peur des médecins. J'ai beau me triturer les méninges, je n'arrive pas à faire le lien entre les médecins et ses cheveux. Toujours est-il que nous en avons bien conscience à la maison et que nous repoussons toujours au maximum le passage chez le coiffeur, pour lui éviter ces désagréments.
Hier, voyant depuis quelque temps ses cheveux recouvrir inexorablement ses oreilles (tout comme son frère, d'ailleurs), je les ai emmenés tous les deux chez une coiffeuse que nous n'avions encore jamais testée.
Pour Gaspard, tout s'est passé comme prévu. RAS.
Pour Hector, tout s'est passé comme prévu également : l'inquiétude qui se lit dans son regard et son attitude dès que nous franchissons la porte, la main portée à ses cheveux à coups de "non non non", le soulagement quand il voit son frère passer en premier, la panique quand il comprend que son tour est arrivé, les pleurs intarissables et les efforts désespérés pour s'échapper pendant toute la (tentative de) coupe.
Je sais que ça se passe mal pour l'instant, mais je me dis que ça finira par rentrer dans l'ordre. En attendant, j'aimerais bien trouver un coiffeur qui sache vraiment s'y prendre avec les enfants apeurés. Car, outre le résultat médiocre (mais pouvait-elle vraiment faire mieux sur un modèle aussi agité ?) de la coupe, l'attitude de la coiffeuse m'a dérangée du début à la fin !
Pour commencer, sachez que je suis de celles qui croient (enfin, plus qu'une croyance, c'est carrément une conviction et une certitude !) que les enfants ne font pas de caprices. Alors quand j'ai entendu la coiffeuse répéter à l'envi qu'il faisait "une colère" et "de la comédie", que ce n'était "pas joli de pleurer", je peux vous dire que je me suis retenue de prendre mon "comédien colérique" sous le bras, avec sa coupe à moitié achevée !
Elle a même cru bon de rajouter que "[son] frère n'avait pas pleuré, lui". Cela ne me semble pourtant pas difficile de comprendre qu'il est plus âgé donc plus mature, qu'il n'a manifestement pas les mêmes expériences, les mêmes ressentis, les mêmes appréhensions, les mêmes traumatismes et que la comparaison s'arrête là sans conclusion à en tirer.
Par-dessus le marché, elle s'est occupée d'eux sans avertir ni expliquer. Et pour le coup, même mon docile Gaspard a moyennement apprécié l'histoire de l'eau froide pulvérisée sans aucune précaution ! Alors qu'il paraît que prévenir et expliquer permettent de tuer dans l'oeuf (et je sais de quoi je parle... humour noir, quand tu nous tiens !) tout ce qui est habituellement (et à tort, dirais-je) qualifié de "crise". Enfin, ce n'est pas "il paraît" : on le pratique à la maison et ça marche plutôt bien... elle devrait essayer !
Le clou du spectacle, c'est au moment de payer que nous y avons eu droit. Comme souvent, un bol de bonbons attendait bien sagement et bien en évidence sur le comptoir. Mes deux loustics les ont repérés et en ont réclamé, mais j'ai refusé. Et là, cette fichue coiffeuse a cru opportun de préciser à l'attention de Hector : "ah bah non, tu as trop pleuré, Maman elle veut pas". J'aurais vraiment dû remettre quelques points sur ses "i", à celle-là !
Premièrement, chez nous, les bonbons c'est en quantité très limitée. En réalité, nous n'en achetons pas et les seuls qu'ils consomment sont ceux qu'ils reçoivent à différentes occasions (rapportés de l'école lors de l'anniversaire d'un(e) camarade de Gapard par exemple).
Deuxièmement, à une demi-heure du repas, il était évident qu'ils n'auraient pas à droit à ce genre d'apéritif !
Troisièmement, chez nous, les bonbons et autres friandises ne servent certainement pas de moyens de pression, chantage ou récompense (systèmes plutôt inusités à la maison d'ailleurs).
Et quatrièmement, si j'avais été dans cette absurde logique, j'en aurais donné à Gaspard mais pas à Hector.
Bref, tout ça pour dire que, aussi futile que cela puisse paraître, nous recherchons toujours un coiffeur qui connaisse son métier et sache s'y prendre avec les enfants !
Vous me direz qu'on pourrait aussi prendre le parti de laisser pousser ses cheveux le temps qu'il s'y fasse, mais le problème, c'est qu'avec sa blondeur et son manque de volume, il risque de ressembler... à ça !